«Nos finances dépendent d’un très petit nombre de contribuables»
À l’approche des votations fédérales du 30 novembre 2025, l’initiative pour l’avenir portée par la Jeunesse socialiste suisse (JUSO) alimente le débat économique et fiscal. Invitée d’une table ronde organisée par la Chambre de commerce, d’industrie et des services de Genève (CCIG), la Conseillère d’État Nathalie Fontanet, en charge des finances, a répondu à nos questions.
Combien de contribuables à Genève sont concernés par l’initiative dite «Pour l’avenir» ?
Nous comptons environ 365 contribuables disposant d’une fortune supérieure à 50 millions de francs dans le canton. Ce qui est intéressant, c’est de voir quelle part ils représentent dans l’ensemble des contribuables : ces 365 personnes ne constituent que 0,15 % du total.
Un tout petit nombre, donc, mais qui contribue à un montant fiscal considérable.
Quel est le montant total des impôts qu’ils versent actuellement?
Si l’on prend ces contribuables et que l’on additionne l’impôt sur la fortune, l’impôt sur le revenu et l’impôt fédéral direct, cela représente environ un milliard de francs.
Mais leur contribution va bien au-delà de ces montants : nombre d’entre eux sont à la tête d’entreprises, ce qui génère également des recettes fiscales indirectes, notamment via l’impôt sur le bénéfice.
Quels risques cela représenterait-il pour le canton et ses finances publiques si l’initiative était acceptée?
Nous parlons ici d’un impôt sur les successions appliqué aux personnes physiques. Or, ces contribuables sont extrêmement mobiles : ils ne vont pas attendre d’être taxés pour quitter le canton. Le principal risque, c’est donc une perte importante de recettes fiscales.
L’impôt sur les successions ne s’applique qu’à un moment précis, au décès, mais les personnes concernées contribuent chaque année à Genève par l’impôt sur le revenu et sur la fortune. Leur départ aurait donc un impact direct et durable sur les finances publiques du canton.
Concrètement, quelles seraient les conséquences pour la population?
Le risque, contrairement à ce que pensent les initiants, c’est qu’en cas de baisse des recettes fiscales, certaines prestations publiques soient remises en question.
Pour donner un ordre de grandeur, les subsides d’assurance maladie versés chaque année à la population représentent environ 800 millions de francs. Or, comme je le mentionnais, les contribuables concernés par l’initiative génèrent à eux seuls près d’un milliard de francs de recettes fiscales.
Il est donc essentiel de mettre ces montants en perspective : une perte de ces contribuables aurait des répercussions directes sur les services offerts à la population.
On parle souvent de pyramide fiscale fragile à Genève. Concrètement, ça veut dire quoi ? Qui paie combien?
Cela signifie que la majorité des recettes fiscales du canton repose sur un très petit nombre de contribuables.
Pour donner un exemple, 1 % des contribuables s’acquittent de 36 % de l’impôt sur le revenu. Et pour l’impôt sur la fortune, cette même proportion de 1 % représente 69 % des recettes totales.
Si ce 1 % de contribuables venait à partir, les conséquences seraient immédiates : faute de ces recettes, le canton devrait soit augmenter les impôts, soit réduire certaines prestations publiques.