Un nouveau campus pour l’apprentissage à Genève
À Genève, la formation professionnelle reste la voie la moins choisie par les jeunes. Pour changer la donne, la Fondation ForPro a inauguré un campus de 22’000 m² à l’Espace Tourbillon. Entretien avec sa directrice.
À Genève, la formation professionnelle reste la voie la moins choisie par les jeunes, alors que deux tiers des jeunes en Suisse optent pour l’apprentissage. Pour inverser cette tendance, la Fondation ForPro, en collaboration étroite avec l’État de Genève et plusieurs partenaires publics, a inauguré en octobre un nouveau campus de 22 000 m² à l’Espace Tourbillon, à Plan-les-Ouates.
Ce lieu unique, à la croisée de l’éducation, de l’innovation et du monde professionnel, réunit des espaces d’orientation, des laboratoires de création (LearningLab, MakerLab, FoodLab, FactoryLab, GrandLab), l’École d’Horlogerie de Genève ainsi que des entreprises partenaires. Un écosystème pensé pour valoriser la voie de l’apprentissage et accompagner les jeunes dans leur construction professionnelle.
Rencontre avec Joëlle Mathey, directrice de la Fondation ForPro, qui explique comment ForPro compte transformer la perception de la formation professionnelle à Genève.
Quelle est la mission principale de ForPro ?
La mission de ForPro, c’est la valorisation et le soutien de la formation professionnelle, donc de la filière de l’apprentissage. Nous nous adressons essentiellement à des jeunes qui se questionnent sur ce qu’ils veulent faire après le cycle d’orientation, à ceux qui sont déjà en formation professionnelle mais souhaitent découvrir d’autres intérêts, ainsi qu’à ceux qui ont terminé et aimeraient se mettre à leur compte pour entrer sur le marché de l’emploi.
Concrètement, comment ForPro accompagne les jeunes ?
Nous avons un programme qui s’appelle Explore. C’est un programme à plein temps destiné aux jeunes entre 15 et 20 ans.
Il repose sur trois axes principaux :
-Le soutien et le renforcement des compétences de base.
-L’ouverture à de nombreuses méthodes, métiers et techniques. Pour cela, nous proposons une grande diversité d’ateliers : cela va de « Crochète ta pochette » à « Construis ton PC », en passant par bien d’autres activités pratiques.
-Travailler et donner de l’utilité au sein de la Fondation. Chaque fois que nous organisons une activité, les jeunes sont impliqués : ils expliquent aux adultes pourquoi ils sont là, ce qu’ils font, et aujourd’hui, par exemple, pendant les portes ouvertes, ce sont eux qui présentent le programme, pas nous.
Combien de jeunes accompagnez-vous chaque année dans leur orientation ?
La première année, nous avons pu accompagner 100 jeunes dans ce programme. Cette année, nous avons recommencé en août avec 100 nouveaux participants et nous prévoyons d’ouvrir 50 places supplémentaires au cours de l’année.
L’idée est de pouvoir accueillir progressivement et de proposer aussi une rentrée juste après Noël. Donc, nous visons environ 150 jeunes, peut-être jusqu’à 200 par année, mais nous sommes encore au début de l’expérimentation à ForPro.
Comment les entreprises sont-elles impliquées dans la structure ?
Les entreprises sont un maillon crucial dans la chaîne de la formation professionnelle. Sans elles, on ne peut pas faire grand-chose.
Dans le système dual, elles recherchent des jeunes pour les métiers où elles ont besoin de main-d’œuvre. De notre côté, nous accompagnons également les formateurs en entreprise.
Si vous accueillez un apprenti ou une apprentie, vous pouvez avoir besoin d’échanger sur des sujets qui ne concernent pas directement votre métier, mais plutôt la relation avec un jeune de 15, 16 ou 17 ans. Pour cela, nous organisons les rendez-vous des formateurs, ouverts à toutes les entreprises et à tous les formateurs.
Nous avons aussi un programme appelé Cekale, qui vise à accompagner les jeunes souhaitant se mettre à leur compte. Nous mettons à disposition des locaux pour ceux qui ont obtenu un CFC et veulent créer leur entreprise. L’objectif est de les aider dans la gestion, car s’ils maîtrisent leur métier, ils n’ont pas toujours toutes les compétences nécessaires pour diriger une petite structure.
Quel est aujourd’hui le plus grand défi pour l’apprentissage à Genève ?
Le plus grand défi, c’est de retrouver un vrai enthousiasme autour de la formation professionnelle. Tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut la valoriser et la soutenir, mais au fond, tout est une question de perception, et les perceptions ont la vie dure.
Nous allons devoir travailler, avec nos partenaires et avec l’État en particulier, pour changer ce regard que l’on porte sur la formation professionnelle. L’objectif, c’est que l’on ait envie que nos propres enfants empruntent cette voie, et pas seulement les enfants des autres.